samedi 29 mai 2010

Safari en Brenne

Pour ceux qui ne connaîtraient pas, la Brenne est un parc naturel régional de l'Indre (Centre) surnommé poétiquement mais à juste titre "la région aux mille étangs" en raison, justement, de tous ses étangs, privés ou publics, la plupart creusés par des moines au Moyen Age mais tous dédiés à la pisciculture (à tel point que la spécialité locale sont les frites de carpe).
Evidemment, les étangs attirent aussi de nombreuses espèces d'oiseaux, d'insectes, de reptiles, de mammifères qui sont autant de gains co-latéraux pour la richesse naturelle du parc. Je vous propose donc aujourd'hui un petit safari photographique effectué le 14 mai, où je vous passerai les foulques, colverts, hérons cendrés et autres ragondins pour dévoiler d'autres bestioles un peu moins classiques. Bon safari !


Le safari commence au sud-est du parc, à l'étang de Durris. On aperçois bien quelques foulques et colverts, que je ne mentionnerai plus à cause de leur omniprésence, mais le premier oiseau digne d'intérêt en un limicole charadriidé (petit bec, pattes courtes) appelé le Grand Gravelot (Charadrius hiaticula), petit échassier amateur d'invertébrés aquatiques gluants (Miam !) qui déterre de la vase avec son bec orange à pointe noire. A ne surtout pas confondre avec le Petit Gravelot (Charadrius dubius) au bec noir ou avec le Gravelot à collier interrompu (Charadrius alexandrinus) aux couleurs plus ternes (mais qui ne fréquente pas la Brenne, de toutes façons).

Sur la rive du même étang, on fait une petite pause entomologique avec Cercopis vulnerata, petit homoptère sauteur bariolé rouge et noir.

Un autre insete : le coléoptère Agapanthia villosoviridiscens, longicorne orange et dévoreur de chardons à l'état larvaire, selon le guide de Michael Chinery.

Le safari se poursuit à l'observatoire de la réserve de Chérine. Caché dans la roselière, derrière les fuligules et les guifettes, on observe un magnifique héron pourpré "à l'oeil de vipère" comme l'épithètent François Royet et Jérôme Bouvier dans leur film Vie sauvage dans les roseaux. Ce bel oiseau piscivore se distingue de son cousin le héron cendré, beaucoup plus commun, par son immanquable plumage rouille.
Dans le second observatoire de la réserve de Chérine, devenu incontournable, on a une vue sur le célèbre bout de bois mort à demi immergé où viennent se chauffer les cistudes, petites tortues amphibies emblématique du parc. Voir à ce sujet mon (excellent) article sur les cistudes en Brenne.

Plus loin, moins emblématique mais tout aussi intéressant, un tarier pâtre (Saxicola torquata) perché sur un fil électrique. C'est un mâle, reconnaissable à son manteau noir et à son écharpe blanche. Peu farouche, j'en profite pour faire une digiscopie assez réussie.
Cet oiseau-là est un brave sédentaire, pas un de ces migrateurs qui profitent de l'été, et, une fois l'hiver venu, repartent pour les pays chauds ! Pour les fondus de systématique, je dirai que c'est un oiseau passéiforme de la famille des Turdidés, qui inclue aussi de nombreuses espèces de chanteurs tels le Rougegorge, le Rossignol, les Grives et les Merles, la Gorgebleue, les Rougequeues, les Traquets et le cousin moins coloré du Tarier pâtre, le Tarier des prés.

Allez, on joue à l'oiseau-mystère ? Bravo à tous ceux ou celles qui ont deviné, il s'agit d'un bruant proyer, "piaf" en apparence terne, banal et sans aucune personnalité. En appaence seulement, car, en réalité, ce passereau est caractérisé par un trait unique chez les Bruants : une "dent" saillante sur la partie supérieure de son bec, visible même à la lunette, qui l'aide à casser les graines dont il se nourrit. C'est lui aussi un honnête sédentaire.

Encore un insecte : le magnifique Azuré de la Bugrane (Polyommatus icarus), qui fréquente les prairies fleuries et dont on trouve les chenilles sur les Légumineuses.

Après ce second intermède entomologique, poursuivons notre safari et arrêtons-nous un instant devant les étangs Foucault, dont le nom me fait immanquablement penser à l'animateur génial de Qui veut gagner des millions ?.


Ce canard est :
  • Réponse A : le monstre du Loch Ness
  • Réponse B : Lucas Michelot
  • Réponse C : une sarcelle d'été
  • Réponse D : un éléphant de mer hongrois
La bonne réponse est : Réponse C : une sarcelle d'été.

La Sarcelle d'été (Anas querquedula) est l'opposé saisonnier de la Sarcelle d'hiver, que nous avons traitée dans un article antérieur. Plus grande, elle est aussi moins colorée : le mâle se contente d'une barre blanche sur la tête. Comme leurs noms l'indiquent, on l'observe en été, alors que sa cousine se rencontre en hiver.

Voici un nouveau limicole : le Chevalier aboyeur (Tringa nebularia). Contrairement au Grand Gravelot, c'est un scolopacidé (long bec, grandes pattes). Il est plus aquatique, et chasse les larves et les petits mollusques en eau peu profonde. En eau vive, il paraît qu'il peut même attraper des alevins (d'après le guide Delachaux et niestlé).

Enfin, le safari se termine en beauté avec l'apparition bienveillante d'un coucou (Cuculus canorus) en train de chanter au sommet d'un chêne. Comme chacun le sait, le Coucou est un parasite de la reproduction : une fois le printemps venu, la femelle pond un unique oeuf dans le nid d'un autre oiseau (Fauvettes et Rougegorge, entre autres). Une fois éclos, le jeune coucou détruit les autres oeufs pour être le seul à être nourrit par les parents, d'ailleurs avec le plus grand zèle. Devenu trop gros pour tenir dans le nid, il prend alors son envol pour perpétuer la tradition.

Bon, le safari est fini, j'espère que ça vous a plut. Maintenant, vous savez quoi faire de vos week-ends : à condition de ne pas habiter trop loin, équipez-vous d'une bonne paire de jumelles, d'un bon guide ornitho et passez faire un tour en Brenne, pas besoin de pique-nique il y a un super restaurant à Rosnay.

2 commentaires:

Nicolas MOULIN a dit…

Pas mal du tout cet article sur la faune de la Brenne, j'ai juste une petite remarque à faire aux niveau des oiseaux: le Grand Gravelot a un bec orange avec une pointe noir, et est tu sûr que le chevalier soit un chevalier aboyeur, le bec ne me semble pas très courbé.

Igor Girault et Lucas Michelot a dit…

Jaune ou jaune orangé, c'est du pareil au même. C'est vrai que j'aurai pu mentionner la pointe noire, mais de toutes façons elle n'était pas visible sur la photo. Quant au chevalier, je suis à peu près sûr que c'est un aboyeur, vu le plumage. Si le bec ne semble pas très courbe, c'est sûrement parce qu'il est en partie immergé. Mais tu as raison pour le gravelot, je vais rectifier. Merci d'avoir relevé le manque de précision.