mercredi 10 août 2011

Troublante tourbière, Ces plantes qui cachent bien leur jeu

A milieu extraordinaire, espèces extraordinaires. Selon cette logique, la tourbière doit bien contenir un certain nombre de plantes et de bestioles étranges. Je connaissais certaines d'entre elles avant mon entrée dans le milieu, aussi me suis-je logiquement mis à leur recherche. Non sans une certaine prudence, ce qui n'est pas un luxe dans ma situation. 
Et aujourd'hui j'ai enfin trouvé une de ces espèces incroyables qu'il me tenait à cœur de découvrir. Malgré sa petite taille, elle m’impressionnait déjà lorsque j'avais ma taille normale. Mais aujourd'hui, du haut de mes 10 centimètre, j'ai l'impression d'avoir changé d'univers en la découvrant. Voyez vous-mêmes.


 La Droséra (ou Rossolis) à feuilles rondes (Drosera rotundifolia) dans toute sa bizarrerie. Au titre des plantes à l'apparence étrange, celle-ci bat des records. Ses petites feuilles en rosettes adoptent une forme de cuiller hérissée de poils, chacun orné à son extrémité d'une goutte scintillante.

Cette apparence d'extraterrestre a-t-elle pour seule but de gagner le prix de "La plante la plus snob du monde" ? Eh bien non, point du tout que nenni. Cette ressemblance avec un lampadaire de bureau du futur n'est point fortuite, pour le prouver approchons nous un peu.


 Joli n'est-ce-pas ? Mais là n'est pas la question, cette particularité a un but on ne peu plus terre à terre, dont voici l'explication.

La tourbière étant un milieu particulièrement pauvre en éléments nutritif (on parle aussi de milieu oligotrophe du grec oligo : «peu» et trophein : « nourrir »), la droséra a opté pour un mode d'alimentation bien particulier et assez rare dans le règne végétal : la prédation. Cette plante cache en effet sous son aspect kitsch et débonnaire une âme de tueur. Bien sûr vous ne la verrez pas bondir à la gorge des campagnols ou traquer le chevreuil à la nuit tombante. Madame est une patiente, une rusée. Elle brandis aussi haut qu'elle peut ses feuilles et surtout les gouttelettes qui y brillent. Pour nous autres, humains, elles ne présentent rien de particulièrement attirant, mais pour un œil d'insecte elles ressemblent tout à fait soit à une goute de rosée (intéressant) soit même à du nectar (précieux !). Poussés par leur appétit, les insectes se posent donc innocemment sur une de ces spatules. Et là, c'est le drame. Ces sphères brillantes s'avèrent être des gouttes de glue qui retiennent prisonnier l'invertébré paniqué avec l'efficacité d'une colle extra forte. Et si vous doutez d'une telle histoire, je vous laisse juger par vous même la photo suivante.


 Eh oui, même une fière et grande libellule (ici un Orthétrum bleuissant, Orthetrum coerulescens) n'est pas à l’abri des tentacules vorace de la belle piégeuse. Cela vous donne une idée des risques que j'ai dû prendre pour vous faire parvenir ces clichés.

Une fois la bestiole solidement engluée, la feuille se referme tout doucement dessus (si la taille de la proie le permet) jusqu'à l'avoir complétement entourée d'un linceul vert, rouge et gluant. Quelques jours plus tard la feuille se réouvrira et plus rien ne subsistera de l'insecte, si ce n'est sa carapace chitineuse, trop coriace pour être digérée. Ainsi la Droséra dispose-t-elle de précieux éléments nutritifs (notamment des matières azotées, rares et primordiales) qu'elle aurait eu grand mal à se procurer de manière plus classique.
C'était là l'histoire de la Droséra.

A bientôt pour la suite de mon journal de bord.

1 commentaire:

Marie-Anne a dit…

Une chance que tu as aussi pu réduire ton APN pour nous montrer ces magnifiques photos!

Sois prudent que l'on puisse connaitre la suite de tes aventures et de tes rencontres!