samedi 5 novembre 2011

Les Chroniques de l'estran, Episode 2 : Laisses de mer (1/2)

Au fur et à mesure que la marée baisse, l'estran se couvre d'amas d'algues, de plumes de mouettes et de bois flotté rejetés par les flots. Mais au milieu de la puanteur et des mouches, on trouve quelques déchets plus intéressants qui font de la plage une véritable vitrine de la faune et de la flore sous-marines.


Plage jonchée de laisses de mer

Toutes ces ordures sont appelées "laisses de mer". A peine échouées, elles sont assaillies par des légions de décomposeurs divers et variés (diptères, coléoptères voire crabes audacieux) auxquels le naturaliste devra disputer sa trouvaille s'il compte l'examiner de près, activité recommandable qui vous permettra de vous familiariser avec les laisses de mer les plus courantes que je vais maintenant vous présenter.


Rhizostoma octopus échouée sur le "dos"

Pour inaugurer ce festival de monstruosité, voici la méduse la plus commune de Bretagne : Rhizostoma octopus. Pouvant atteindre un mètre de diamètre, elle est heureusement inoffensive pour l'Homme puisqu'elle ne mange que du plancton et ne possède pas de tentacules venimeux à proprement parler, mais seulement huit bras qui lui ont valu son nom scientifique (octopus => "huit pieds"). Ces derniers entourent la bouche placée sous l'ombrelle, énorme, qui renferme le système digestif et les organes génitaux.


Rhizostoma octopus échouée dans le bon sens. En Méditerranée, elle est remplacée par une espèce à peu près identique : Rhizostoma pulmo.

Sur son pourtour, celle-ci est dentelée et ornée d'un joli petit liseré bleu, tentative dérisoire de faire oublier l'odeur abjecte qui se dégage du cadavre, lequel semble d'ailleurs si immonde qu'aucun charognard ne se risque à le consommer. Heureusement, les rayons ardents du soleil breton auront tôt fait de faire fondre cette abomination, qui s'en retournera à la mer sous forme de coulée laiteuse dégoulinant le long de la plage.


Ponte de buccin

Moins impressionnante mais plus énigmatique, voilà une laisse de mer courante surnommée "raisin de mer" ou encore "savonnette de mer". Cet amas ressemblant à un bloc de polystyrène altéré par l'eau de mer, qui peut atteindre la taille d'un ballon de foot, est en réalité composé de centaines d'oeufs de buccin (Buccinum undatum), un gros gastéropode carnivore.

Buccin (6 cm de haut)

Eponges dessécuées et tests d'oursin (Psammechinus miliaris)

On peut aussi ramasser quelques spécimens plus discrets, comme ces petites éponges silicieuses (une identification assez hasardeuse me fait pencher pour le genre Haliclona), animaux rudimentaires qui s'alimentent en filtrant l'eau à travers les pores de leur corps. Aucun véritable organe ; des cellules flagellées appelées choanocytes tapissent les parois internes de l'organisme et assurent la circulation de l'eau.
Ou encore ces trois tests d'oursin : c'est ainsi que l'on appelle le squelette externe de ces charmants échinodermes épineux une fois vidé de son hôte.

A suivre...

2 commentaires:

Nicolas MOULIN a dit…

Pas mal du tout l'article, je voulais juste savoir si les buccin sont apparenté au bulots, vu que la forme est très ressemblante. Et aussi qu'entend tu par carnivore? Que prédatent-ils?

Igor Girault et Lucas Michelot a dit…

Bulot est un synonyme de buccin, quoique plutôt utilisé pour désigner la nourriture. Ils se nourrissent essentiellement de cadavres de mollusques et de poissons.