vendredi 6 août 2010

Vous auriez pu trouver ...

Le suspens étant devenu insoutenable, et la participation presque négligeable (encore merci Mad de faire vivre les commentaires), je me suis décidé à vous révéler la vérité à propos des photos de l'article dernier. Il s'agissait d'eau, ce que tout le monde a du comprendre. Mais le plus intéressant, c'est ce que l'on ne voit pas. Et en l'occurrence, il s'agissait de ceci :

En voyant cette image, vous vous taperez la paume de la main à l'aide de votre autre main, en poing celle-ci, tout en tirant le langue.
Ce faisant, vous vous exclamerez :
"Saperlipopette, ainsi s'agissait-il de gerris, que leur pattes recouvertes de poils hydrofuges empêche de couler et crées de ce fait des dépression à la surface de l'eau."

Et effectivement, il s'agissait bien de cela.

Mais rassurez-vous, bientôt vous pourrez reprendre vos habitudes et lire en toute tranquillité les excellents articles que nous vous avons concocté durant ce petit intermède.

A bientôt, donc, pour de nouvelles aventures !

samedi 31 juillet 2010

Petite pause

Je sens un peu de relâchement après de si intenses exposé scientifique sur la microfaune des mares. Aussi voila une petit pause pour vous divertir et vous reposer de tant d'efforts intellectuel.

Il s'agit, vous vous en rendrez compte, d'une de ces photo incompréhensible qu'il va vous falloir décrypter. Encore une fois j'espère que vous aurez de l'imagination. Ce dont je ne doute pas d'ailleurs.



Alors, qu'est-ce ?
Ce coup là il y a deux photos. Peut être que cela va vous aider.
Dans tous les cas je vous souhaite bonne chance.

vendredi 2 juillet 2010

Les Dents de la mare, épisode 4 : L'Abeille d'eau

Jusqu'ici, mes articles se sont limités aux Coléoptères aquatiques. Ce ne sont pourtant pas les seuls insectes à être retournés vivre dans l'eau, après un long passé terrestre. L'autre groupe important d'insectes maresques est l'ordre des Punaises. Assez bien représenté dans nos mares de campagne, il offre toute une palette de prédateurs redoutables qui n'ont rien à envier aux Dytiques.
La Notonecte glauque (Notonecta glauca) est de ceux-là.



Un beau jour de ma tendre enfance, notre moniteur CPN avait emmené mon club pêcher dans une grande mare forestière ombragée. Après quelques coups d'épuisettes timides, j'avais acquis le coup de main et plongeais maintenant sans hésitation ma main au fond de mon filet boueux (en rêvant secrètement de ramener une bestiole mutante). Vous devinez la suite ? Je tombe sur un petit insecte blanchâtre que je pose avec insouciance sur le dos de ma main pour l'examiner de plus près, et je ressent aussitôt une vive douleur comparable à une brûlure.
J'appris plus tard que la Notonecte était anciennement surnommée "abeille d'eau"...


On voit ici la taille de la bestiole en question. Rien de bien impressionnant, pas de grosse carapace luisante comme l'hydrophile, pas de forme aberrante comme la larve du dytique, mais tout de même un rostre affuté, tout près à châtier le petit naturaliste imprudent.

La notonecte est une snob. Au lieu de nager comme tout un chacun, c'est à dire plus ou moins élégamment sur le ventre, celle-ci a décidé de se retourner, se plaçant sur le dos. Collée à la surface par en dessous, elle peut aisément respirer, harponner les pauvres insectes naufragés pour s'en faire un petit quatre-heure et repérer l'épuisette sournoise brandie par un entomologiste machiavélique. La première photo représentait donc la face ventrale de l'animal.
Ce petit exposé sur la technique natatoire de la Notonecte avais pour but de vous informer mais aussi de vous faire apprécier pleinement le cliché qui va suivre. Mesdames et messieurs, voici maintenant en exclusivité la photo d'une notonecte vue de dos.



Cette photo, exceptionnelle rappelons-le, nous montre bien les belles couleurs de cette punaise aquatique. La carapace acajou est surmontée d'un triangle noir du plus bel effet. On remarque également la grande différence de taille entre les deux pattes arrière (servant à la nage) et les deux autre paires (servant à attraper des choses, proies ou support).

La notonecte est un des insecte aquatique les plus facile à observer. Il est très courant, occupant chaque petit point d'eau, voire certaines flaques temporaire. La bête peut en effet s'envoler (surtout la nuit) et aller chercher ailleurs si les têtards n'y serait pas plus vert.
Que ma mésaventure ne vous empêche pas d'aller admirer cette bestiole dans son milieu naturel, quelques précautions (parmi lesquelles des gants en kevlar ignifugés et une pince à cornichon grand modèle) suffisent à s'éviter la pénible vérification des capacités urticantes de la charmante bestiole.

Et prochainement, ne ratez pas : Les Dents de la mere, épisode 5 : De pinces et de rostres...

Les Dents de la mare, épisode 3 : Evolutions convergentes

Dysticus marginalis n'est pas un cas unique : il existe de nombreuses autres espèces de coléoptères aquatiques que l'on peut retrouver dans les mares.
La famille des Dysticidés comporte notament, outre les différentes espèces du genre Dysticus qui ressemblent toutes au Dytique marginé et ne sont pas toujours très faciles à différencier, un genre qui sort un peu du lot, au stade larvaire comme au stade adulte : Acillius sulcatus.


Deux spécimens d'Acillius : un mâle (en haut) et un femelle (en bas).

Proche parent du Dytique marginé, il partage ses diverses adaptations à la vie aquatique dont nous avons parlé dans l'épisode précédent (pattes frangées de poils, bulle d'air renouvelable, hydrodynamisme). C'est lui aussi un féroce prédateur, qui préfère néanmoins généralement s'attaquer à de plus petites proies que son gros cousin en raison de sa moindre taille (jusqu'à 2 cm). Le mâle et la femelle se distinguent par leurs élytres : ceux du mâle semblent lisses et glabres alors que ceux de la femelle sont creusés de profonds sillons couverts de poils jaunâtres.


Larve d'Acillius. Notez la petite tête tachetée au bout du long prothorax si caractéristique.

La larve est quand à elle diffère encore plus du Dytique marginé : rappelez-vous l'effrayant monstre qu'était sa larve, avec sa grosse tête et ses crochets démesurés... Rien à voir à première vue avec la larve d'Acillius, étrange animal que l'on est d'abord tenté de classer aux côtés de la Crevette grise tant son gros abdomen dodu et sa petite tête insignifiante l'éloigne de la carrure musclée de la larve de Dysticus. Cette larve unique en son genre ne figure pas dans le guide de Michael Chinery (en réalité, c'est peut-être pour ça qu'elle semble sortir de l'ordinaire...). Heureusement, elle est impossible à confondre et grâce à cet article vous pourrez la reconnaître du premier coup d'oeil, si vous tombez dessus à l'occasion (on ne sait jamais). Toutefois, le comportement des deux larves est assez semblable dans les grandes lignes. La larve d'Acillius se nourrit de la même façon que la larve de Dysticus (... avec ses tout petits crochets !) et respire à l'aide du même procédé (tube digestif qui fait office de tuba).



L'Hydrophile.

Les Dysticidés ne monopolisent cependant pas l'espace aquatique des coléoptères. Sans parler des familles plus discrètes et des petits gyrins, on peut s'attarder sur un dernier coléoptère, dont Pierre Déom disait, dans son numéro "spécial mares" de La Hulotte, que si les Dytiques étaient les "tigres de la mare" ce serait lui un "éléphant d'eau douce". Effectivement, ce gros insecte que l'on appelle Hydrophile (Hydrophilus piceus) est le plus gros coléoptère aquatique d'Europe (5 cm et plus !). Contrairement aux Dytiques, redoutables carnassiers, l'Hydrophile est un paisible végétarien qui se nourrit exclusivement de végétaux aquatiques (à considérer donc comme une parenthèse dans notre saga, consacrée avant tout aux prédateurs). C'est également un piètre nageur, mais de toutes façons il n'a pas de proies à poursuivre, et sa ressemblance avec une feuille de potamot (il en a à la fois la couleur, la forme et la taile !) suffit souvent à le camoufler aux yeux des prédateurs. Il est tout de même en régression dans une grande partie de la France, car très sensible à la pollution.




On distingue ici les réserves d'air de l'Hydrophile, qu'il stocke sous son thorax tout comme les Dytiques.

Si il ressemble à première vue à un gros dytique, l'Hydrophile et ses voisins carnivores n'ont aucun lien de parenté : à la manière des Dysticidés qui descendent des Carabiques (ou plutôt qui ont un ancêtre commun avec les Carabiques modernes), l'Hydrophile descederait d'un tout autre groupe de coléoptères, les Scaraboidés (Hannetons, Cétoines et consorts), connus pour être essentiellement de paisibles herbivores, comme les Carabes sont connus pour être des carnassiers notoires. La ressemblance extérieure entre un dytique et un hydrophile s'explique par une convergence évolutive : les deux lignées ont sélectionné les mêmes adaptations à la vie aquatique aux mêmes contraintes liées à cet environnement.
L'Hydrophile, sans être finalement directement concerné par le sujet de la saga, est finalement un si bon exemple d'évolution convergente avec les Dytiques qu'il aurait été dommage de passer à côté.

Et prochainement, ne ratez pas : Les Dents de la mare, Episode 4 : L'Abeille d'eau...